L’interview de Arnaud Bund, le créateur de la marque de chaussures de luxe Arno Bund

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Découvrez l’interview de Arnaud Bund, le créateur de la marque de chaussures de luxe Arno Bund.

Pouvez-vous vous présenter et nous en dire plus sur votre parcours ?

« Je me nomme Arnaud Bund, j’ai une petite quarantaine et je suis le fondateur de la marque de chaussures quasi-éponyme arno bund.

A la base je suis quelqu’un qu’on prédestinait plutôt à une carrière disons, intellectuelle. Mais il y a dizaine d’années mon besoin de faire quelque chose de mes dix doigts prit le dessus et se jouxta à une passion intrinsèque de la chaussure pour femme. 

J’ai donc pu surmonter de premiers obstacles de bureaucrates aberrants pour commencer à apprendre le métier de bottier dans la capitale sinistrée de Romans, devenir ouvrier, artisan au sein de différentes maisons puis aujourd’hui entrepreneur. Mon but dans la poursuite de cette passion a toujours été de créer mes propres souliers, du design jusqu’à leurs compositions.

 

Quelles sont les qualités requises pour exercer votre activité ?

« J’ai avant tout dû faire preuve de persévérance dans l’acquisition d’un savoir-faire malheu-reusement, encore aujourd’hui, en perdition en France.
La création, être imaginatif est évidemment indissociable pour moi de ma vision de la botterie : ne pas faire comme tout le monde, réaliser quelque chose de différent, jamais vu auparavant, et en parer, avec confort, les pieds de mes clients.
Enfin j’aimerais parler de ce métier-passion qu’il aura fallu faire coïncider avec une évolution de mon regard sur le monde et sur la vie environnante. La première question que je devais ré-gler était celle du travail du cuir et de mon végétarisme adopté il y a plus de dix ans. J’évoluais au beau milieu d’un paradoxe et plutôt que de rester aveugle, dans la zone de confort que l’on m’avait aménagée, j’ai choisi de regarder la souffrance animale en face et d’essayer, à mon humble niveau, d’y apporter un cataplasme. J’ai dû alors m’adapter et presque devenir un avant-gardiste dans la recherche et l’utilisation de matériaux novateurs et donc plus respec-tueux de notre environnement. Aujourd’hui je suis très fier des ponts jetés entre moi et mes fournisseurs de matières responsables et c’est un travail de tous les jours que de continuer à veiller et à tendre de nouvelles passerelles entre ce que la nature peut nous offrir et ce que l’on peut en faire dans la botterie.

 

Quelles sont vos motivations à exercer cette activité ?

« Créer du beau et faire sens.
Donner des accents de poésie à la botterie et par là-même la faire évoluer, faire évoluer les gens et les consciences qui nous portent, que l’on porte.
Montrer que l’on peut faire du beau, du qualitatif, du luxe, autrement, et de manière respon-sable. Donner envie aux gens d’être responsables, à notre échelle de leur manière de se vêtir, de se chausser dirons-nous.
Que nos chaussures à leurs pieds leur procurent cette sensation d’être portés, de se porter, sur piédestal. »

 

Qu’est-ce que vous aimez le plus dans votre métier ?

« Créer.
Créer à partir de mes sens, puis de ma tête, jusqu’à mes mains qui traduiront cela ici sous forme de souliers.
Premier élément : un design original. Pour preuve un sneaker qui visuellement ne ressemble à aucun autre, véritable défi asymétrique dans la botterie. Ou encore un talon-double unique au monde, réussite esthétique mais aussi prouesse technique du fait d’une hauteur très stable et donc très confortable.
Second élément : l’engagement environnemental. Quelques pièces encore en cuir, matière “noble”, mais uniquement supercyclée. Une licence dont nous sommes (malheureusement) les seuls détenteurs dans la botterie française et qui nous permet d’exploiter une toile obtenue à partir de plastiques repêchés en pleine mer et transformés en fibres textiles. Des déchets de l’industrie agro-alimentaire mis aux pieds de nos clients sous formes de fibres végétales (bam-bou, maïs, cane sucre) possédant non seulement l’aspect mais aussi toutes les caractéristiques conférées aux bons cuirs. Du pneu de voiture recyclé pour une forte identité et ainsi supplanter les classiques semelles en cuir ou en élastomère, etc…
Tout ça est englobé dans le processus de création entamé, il ne faut pas l’oublier, à ma petite échelle d’ouvrier. Car dans le nom d’ouvrier on trouve aussi le mot œuvre.

 

Quelles sont les valeurs que vous défendez ? Comment voyez-vous l’avenir en terme de développement ?

« Ces valeurs se sont évidemment déjà révélées au travers des précédentes questions. Elles nous habitent tellement que je ne pouvais pas les retenir jusqu’ici.
La plus forte d’entre elles se retrouve donc au travers de la volonté de vouloir, réellement, créer une mode plus durable, plus engagée, plus responsable de part notre spécialité qu’est le chaussant. Si nous, petits que nous sommes, choisissons de prendre cette voie, aussi tôt soit-il, je suis convaincu que nous ne pouvons que grandir et peut-être, je l’espère, même inspirer les grandes marques dans cette quête du renouveau, pour parfaire notre clientèle.
A cette conscience environnementale je voudrais aussi ajouter la notion d’éthique que nous favorisons certes déjà en produisant aujourd’hui, que ce soit les matières premières comme les chaussures, dans des ateliers exclusivement européens et à taille humaine. Mais l’objectif de notre marque est aussi de pouvoir relocaliser sa production dans son pays de naissance. Dans cette optique, et pour peut-être renouer avec mon métier de base qui touchait directement à la confection, nous envisageons donc de nous rapprocher d’une structure capable de former la génération suivante aux besoins de notre marque, tant en prêt(e)-à-porter qu’en botterie sur-mesure.
C’est un beau pari, un pari sur l’avenir de la botterie haut-de-gamme, française, en France.